Etre mère– Un sacré défi

Publié le 26 Février 2014

Etre mère– Un sacré défi

Une relation mère-fille peut-elle être paisible, harmonieuse ? Quelle est vraiment ma relation avec MissTer ? Comme je suis foncièrement optimiste, je préfère en parler de façon positive. J’élude ou minimise la partie plus sombre. Me rassurant comme je peux, en pensant que c’est pareil chez les autres. Que des tensions, on en vit forcément, avec chacun de ses enfants. Que ça fait partie du jeu.

 

Pourtant, quand je raconte précisément ce qu’il se passe dans nos moments de conflit mère-fille, j’entends des « Ah oui, quand même ! ». Il faut reconnaître que MissTer est très forte pour toucher là où ça fait mal. Ce n’est pas anodin si elle refuse mon autorité alors qu’elle l’accepte beaucoup plus facilement de n’importe qui d’autre. Quand le ton monte entre nous, ce que j’essaye d’éviter au maximum (tu vas vite comprendre pourquoi), elle me pousse dans mes derniers retranchements. Refusant d’aller dans sa chambre ou de me laisser souffler, même quelques minutes. Le ton monte, nous vociférons des cris. Il est même arrivé qu’elle me donne des coups. Face auxquels je me sens bien impuissante…

 

Après ce genre de crise (relativement rare, je te rassure), viens rapidement le temps de la parole. Et de l’écoute. C’est le moment où chacune exprime son ressenti, à froid. Où on cherche des solutions aussi. Pour ne pas revivre ça. Pour assouvir les besoins de chacune. Mais aussi pour énoncer à nouveau les règles de vie. Le respect que l’on se doit, l’une à l’autre.

 

Mais quand même. Ces instants de révolte me soulèvent le cœur. Parce que ma crainte la plus profonde se réveille. Et si elle était en souffrance ? Et si ma façon de faire avec elle lui portait préjudice ? Et si, par ma faute, mon comportement, je lui transmettais des trucs négatifs, contre lesquels elle devra se battre plus tard ? Si je faisais des dégâts avec mes remarques désobligeantes, mes coups de sang, mes défauts de mère ?

 

Cette peur est ancrée, vivace, prégnante. Elle a fait couler beaucoup de larmes. Elle est bien sûr à l’origine de mon sentiment d’avoir été une mère lacunaire.

 

Pourtant, cette appréhension a été motrice. Elle m’a conduit à réfléchir à ce que je voulais vraiment pour elle, pour eux. Quelle mère je voulais être. Elle a été déterminante dans ma décision de faire une thérapie.

 

Voilà comment j’ai fini par regarder la réalité en face. En faisant le point sur mon propre chemin. Sur les raisons qui ont fait que je n’étais pas épanouie en tant que mère. Et tu sais quoi ? C’est franchement difficile de reconnaitre qu’il y a eu des lacunes dans sa propre éducation. Surtout quand on a toujours été persuadée que son enfance a été très heureuse. C’est compliqué de mettre le doigt sur ce qui a manqué, sur ce qui nous a conduits à adopter tel ou tel comportement. C’est délicat d’admettre les torts de nos parents. C’est même une sorte de trahison. Parce qu’ils ont fait tout ce qu’ils pouvaient, avec les moyens et le vécu qu’ils avaient. Et pourtant, j’en suis là, à démêler les fils pour avancer. A ne pas vouloir reproduire. Cela dit, je ne leur en veux pas. Je sais d’où ils sont partis, j’ai les clés pour comprendre. Mais je sais aussi que je ne pourrais sans doute jamais aborder le sujet avec eux. Trop peur de leur faire du mal, et pour en retirer quoi ?

 

Aujourd’hui j’ai déposé la plupart de mes lourds bagages. J’ai (presque) arrêté de me juger. Je suis dans l’action, plus dans la réflexion. Je sais où je vais, je me donne les moyens. Je me connais mieux et quand je sens la dérive, je réagis. Je fais en sorte de poser ma casquette de mère pour retrouver celle de copine, sœur, femme, amante. De faire un break de mes enfants.
 

 

Il n’empêche que subsistent des moments où la petite voix me susurre que tout n’est pas gagné. Que dans vingt ans, MissTer sera peut-être, à son tour, obligée de décortiquer mes agissements, pour pouvoir aller de l’avant. Que malgré mes efforts, mon acharnement à m’améliorer, je fais peut-être d’autres erreurs, non sans conséquences pour elle. Alors pour ne pas sombrer à nouveau, je m’accroche à l’espoir fou qu’il n’en sera rien, ou tout au moins que ses bagages à elle, seront plus légers que les miens. Je le lui souhaite, tellement. Qu’elle soit juste libre d’être qui elle veut.

 

 

C'était mon être mère, pour Babidji.

Rédigé par Aloès

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